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Témoignage: l'histoire de Suryan


"Notre fils, Suryan, partit pour l' Université de l'Etat de Floride en août 2001. Il était un coureur avide, il avait participé à la compétition de course de l'Etat de Floride cette année. Il commença à se plaindre de douleurs au pied gauche à peu près dès son arrivée à l'université. Il est allé à la consultation du médecin de l'université qui lui a dit que ce n'était rien, qu'il avait le pied plat et qu'il fallait porter des semelles othopédiques. Suryan pensait qu'il s'était sans doute fait mal en courant. Après deux semaines de douleurs croissantes, il retourna voir le médecin qui lui prescrivit une radiographie. La radiographie ne montra rien, donc on l'envoya faire de la kinésithérapie après 2 semaines d'attente. Le kinésithérapeute pensa qu'il y avait quelque chose de bizarre à son pied, donc il l'envoya consulter un chirurgien orthopédique. Après l'avoir examiné, il suggèra une IRM. Nous attendîmes encore 2 semaines pour avoir les résultats de l'IRM. Le médecin nous dit que Suryan avait une tumeur dans le pied et qu'il devait consulter un onco-chirurgien. Et donc à nouveau, nous attendîmes 2 semaines pour avoir un RV à l'hôpital universitaire, qui était à 2 heures de chez nous. Nous consultâmes donc le chirurgien qui pensa que c'était une tumeur bénigne, mais nous devions faire une biopsie pour en être certain. Elle fut programmée une semaine plus tard. Il pensait que cela devait être fait tout de suite et ne pas attendre, au cas où. La biopsie montra des cellules cancéreuses mais ils n'étaient pas capables de nous dire de quel cancer il s'agissait et ils devaient faire des analyses complémentaires.

Donc, alors qu'il a 18 ans et qu'il est en 1er semestre d'université, Suryan apprend qu'il a un cancer. Ce fut une nouvelle absolument terrible pour nous car notre fille était morte 5 ans auparavant, à l'âge de 9 ans, dans un accident de voiture. Cela a pris 3 mois pour déterminer qu'il avait une tumeur rhabdo ce qui était la durée normale pour diagnostiquer ce cancer. Le pathologiste a encore mis 10 jours pour découvrir qu'il s'agissait d'un rhabdomyosarcome. Ils décidèrent de faire une scintigraphie osseuse, une biopsie de moelle osseuse et plusieurs IRM pour déterminer si la tumeur de Suryan était localisée ou disséminée. Nous apprîmes que nous avions à faire au pire scénario, le cancer de Suryan était dans sa moelle osseuse et aussi dans sa hanche gauche, en plus de son pied. Le cancer de son pied était jugé inopérable. Comme sa moelle osseuse était déjà infiltrée, ils pensaient qu'une opération n'était pas de mise. On nous proposa de faire un essai thérapeutique ou bien le traitement standard. Nous choisîmes l'essai thérapeutique et on nous dit que la chance de survivre 2 ans était de 10%. On choisit de faire un traitement de vincristine, actinomycine, cytoxan [cyclophosphamide] en alternance avec de l'irinotecan et des rayons pendant 10 mois. Suryan était déterminé à finir ses cours à l'université et se débrouilla pour que ces examens finaux soient tard ainsi, il ne perdait pas ses crédits. Nous habitions à 4 heures de l'hôpital et c'est ainsi que notre parcours commença.

Après 2 semaines de traitement, nous ne nous sentîmes pas à l'aise avec notre oncologue. Il n'est pas facile de rechercher un nouvel oncologue en plein traitement mais nous avons eu la chance de trouver un autre centre de traitement merveilleux, à 4 heures et demi de chez nous. Suryan fut traité au Nemours children's Clinic de Jacksonville, Floride. Le traitement se déroula très bien avec un seul épisode de fièvre neutropénique. Nous avons vécu 2 mois à la maison des parents Ronald Mac Donald de Jacksonville pendant le traitement, comme ça il pouvait revecevoir son traitement de radiothérapie à son pied gauche et sa hanche gauche. Il avait des traitements par rayons deux fois par jour car ils pensaient qu'ils pouvaient faire plus de rayons et ainsi avoir de meilleures chances de parvenir à une rémission. Nous ne sommes pas parvenu à une rémission avant 9 mois de traitement, c'est à dire un mois avant la fin du traitement. Mais ce fut un soulagement d'enfin entendre le mot rémission.
Suryan avaient vraiment envie de retourner à l'université et d'avoir une vie normale. En août, un mois avant la fin des traitements, il recommença l'école. Je me rappelle de son visage souriant lorsque nous l'aidâmes à emménager dans son nouvel appartement. Il était tellement content d'être à nouveau "normal". Il pensait vraiment qu'il avait vaincu cette chose appelée cancer. Nous devions retourner à la consultation une fois par mois et un bilan complet était prévu tous les 3 mois. En tant que parent, on s'attend à ce que la bombe tombe à nouveau. On veut tellement penser positivement mais on est tellement effrayé pour son enfant.

En février, les résultats du bilan de Suryan n'étaient pas entièrement satisfaisants. Ils décidèrent de faire un nouveau bilan 4-6 semaines plus tard. Le 25 mars, nous apprîmes que la bête était de retour dans sa totalité. Il avait rechuté dans sa colonne vertébrale et son pelvis et sa moelle osseuse. Donc on nous proposa deux différents essais thérapeutiques et nous choisîmes le ARST 0121. C'est un essai qui combinait adriamycine, cytoxan, triazépamine en alternance avec ifosfamide, etoposide et radiothérapie. Suryan était une fois encore déterminé à finir son année scolaire, donc il commença la chimio en avril et se débrouilla pour finir son semestre. Je crois qu'il savait qu'il n'aurait peut être jamais plus cette possibilité. Nous avons fait les 10 mois de chimio mais ils pensaient que les rayons ne pourraient pas se faire au milieu de la chimio. La zône à irradier était trop large et ils pensaient qu'il ne pourrait pas récupèrer. Et donc nous avons terminé la chimio en décembre et nous sommes partis 10 jours en vacances à Hawaï. Suryan réalisa son rêve d'aller à la pêche au marlin, même si ils lui échappèrent. Il put surfer sur des vagues fabuleuses et aima chaque instant.

Nous revînmes et on nous donna les résultats des examens, ils n'y avait pas de changement, les résultats étaient stables. Nous sommes donc allés consulter à nouveau pour une éventuelle radiothérapie où ils firent un PET-scan pour déterminer si il y avait des cellules tumorales actives. Le résultat du PET fut qu'il y avait des cellules actives donc ils les biopsièrent. Ils ne trouvèrent aucune cellule active, c'était comme chercher une aiguille dans une meule de foin. Donc on commença les rayons sur sa colonne vertébrale pendant 3 semaines. Pendant ce temps, Suryan eut des sérieuses douleurs au dos. Finalement on lui fit d'autres examens et on réalisa que la tumeur avait rongé une vertèbre et qu'elle risquait à tout moment de s'affaisser. Suryan subit alors une opération afin de stabiliser cette vertèbre avec de la "colle à os", ce qui fonctionna bien et sa douleur était partie. On fit de nouveaux examens pour voir si son dos était stable et ils trouvèrent une autre tumeur dans sa colonne vertébrale. Après quelques consultations supplémentaires, ils décidèrent d'irradier également cette tumeur donc nos 3 semaines se changèrent en 7 semaines. Il termina le jour de son 21eme anniversaire ! On nous dit qu'il faudrait encore faire de la chimio pour empêcher cette rechute de grossir mais qu'il fallait attendre un mois afin de laisser Suryan récupèrer. Une semaine plus tard, Suryan était complètement à l'agonie, avec des douleurs croissantes et des vomissements. Nous sommes retournés à l'hôpital où l'on s'aperçut que le rhabdomyosarcome était partout dans ses poumons.

Nous n'aurions donc pas de répit. Ils donnèrent à Suryan de 2 semaines à 2 mois à vivre. J'étais tellement effondrée que je me sentais dans un autre monde. Mon mari et moi avons dû lui apprendre qu'après 29 mois de lutte, nous avions perdu la bataille. Comment dire à son enfant qu'il ne pourra pas se marier, avoir des enfants et vivre sa vie? Je lui ai dit que nous nous étions bien battus et que j'étais fière de lui. Je me suis penchée pour le serrer dans mes bras avec les larmes aux yeux et il m'a dit "Maman, ne fais pas ça ou je ne vais pas du tout tenir le coup". Je me suis alors reprise et je me suis dit que j'avais le reste de ma vie pour pleurer, pourquoi gâcher le peu de temps qu'il nous restait ensemble?

Il choisit de tenter une nouvelle fois la chimio, l'étoposide oral, pendant 1 mois. Bien que rien ne pouvait arrêter la bête à ce moment. Nous avons alors vécu 4 semaines de vie, pendant lesquelles il alla surfer quelques fois encore, rendre visite à des parents, et essayer de faire tenir une vie sur 1 mois.

Suryan et moi avons parlé de la mort une fois à ce moment là. Il me demanda quand il allait mourir. Je lui ai répondu "personne ne sait quand il va mourir, vis juste ta vie comme si c'était ton dernier jour sur Terre." Ce qu'il fit jusqu'à la toute fin. Nos 4 derniers jours furent magiques, en vacances avec Suryan qui a pu surfer à Cocoa Beach, faire du canoe dans les canaux avec des amis et se faire des derniers souvenirs.
Il mourut sans douleur, il alla à l'hôpital pour un saignement de nez. Ils ne purent pas arrêter ce saignement, ces organes cessèrent de fonctionner et il mourut 20 heures plus tard. La dernière chose que je lui ai dite avant qu'il ne tombe dans le coma fut "je t'aime tellement" et il m'a répondu "c'est l'évidence même!" Il ferma les yeux et ne les ouvrit plus jamais.

Suryan et moi avions parlé d'aider la recherche après sa mort. Je lui ai dit que j'allais entreprendre un fond pour la recherche sur le rhabdomyosarcome, afin que personne d'autre n'ait jamais à vivre ce que notre famille avait vécu. J'ai contacté le dr Barr à l'université de Pennsylvanie pour lui proposer d'aider à financer ses recherches sur le rhabdomyosarcome. Nous continuons à récolter des fonds pour aider à trouver des meilleurs traitements à cette terrible maladie."

Traduit de l'anglais

Suryan's website (in english)


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